Carte postale de l'avenue Rollin envahie par la foule |
Il y a un peu plus d'un siècle, le 19 juin 1910, Anduze connut l'une de ses plus grandes manifestations. Un rassemblement d'une telle ampleur qu'on éprouva la nécessité d'en conserver le souvenir à travers l'édition de cartes postales spécifiques. Si les collectionneurs d'aujourd'hui les connaissent bien pour leurs valeurs marchandes, il est moins sûr qu'ils en appréhendent l'importance documentaire. Il est vrai que cet événement est tombé depuis longtemps dans l'oubli, comme le nom du maire de l'époque d'ailleurs. C'est donc l'occasion ou jamais d'évoquer Fernand Simard, horticulteur de métier et premier magistrat de notre cité entre 1909 et 1912.
Mais revenons d'abord au motif qui déclencha cette agitation bien au-delà de notre territoire local : l'élection du député Marius Devèse. Celui-ci, lors du renouvellement de l'Assemblée Nationale en avril 1910, s'était présenté à la première circonscription d'Alais et fut par le sous-préfet annoncé battu au bénéfice de son principal rival Marcel Cachin et à quelques voix près. Mais la commission de recensement rectifia, après contrôle, le résultat en sa faveur. L'autre, bien sûr, protesta et cette situation entraîna l'organisation de la grande " manifestation pour la Justice " dont la Porte des Cévennes devint le réceptacle…
L'intérêt de ma part pour cet épisode de l'histoire d'Anduze vient d'un feuillet que j'ai découvert récemment, rempli d'une écriture rapide et presque illisible, avec des ratures, qui est sans aucun doute le brouillon d'un discours ou d'un tract du maire d'Anduze. Ce document, écrit quelques temps avant la manifestation, traduit bien l'inquiétude de Fernand Simard quant aux éventuels débordements que pourrait engendrer ce genre de rassemblement politique. En voici l'inédite et intéressante teneur :
Mais revenons d'abord au motif qui déclencha cette agitation bien au-delà de notre territoire local : l'élection du député Marius Devèse. Celui-ci, lors du renouvellement de l'Assemblée Nationale en avril 1910, s'était présenté à la première circonscription d'Alais et fut par le sous-préfet annoncé battu au bénéfice de son principal rival Marcel Cachin et à quelques voix près. Mais la commission de recensement rectifia, après contrôle, le résultat en sa faveur. L'autre, bien sûr, protesta et cette situation entraîna l'organisation de la grande " manifestation pour la Justice " dont la Porte des Cévennes devint le réceptacle…
L'intérêt de ma part pour cet épisode de l'histoire d'Anduze vient d'un feuillet que j'ai découvert récemment, rempli d'une écriture rapide et presque illisible, avec des ratures, qui est sans aucun doute le brouillon d'un discours ou d'un tract du maire d'Anduze. Ce document, écrit quelques temps avant la manifestation, traduit bien l'inquiétude de Fernand Simard quant aux éventuels débordements que pourrait engendrer ce genre de rassemblement politique. En voici l'inédite et intéressante teneur :
" Citoyens,
Une manifestation grandiose se prépare pour dimanche dans notre ville. De tous les points de notre circonscription tous les électeurs républicains honnêtes viendront à Anduze clamer leur indignation contre les manœuvres frauduleuses qui ont amené la proclamation provisoire de M. Devèze comme député.
" Vous recevrez dignement tous les manifestants, vous pavoiserez vos maisons et vous montrerez à tous qu'Anduze est toujours le boulevard de la République dans notre arrondissement. Je suis sûr que mes hôtes d'un jour emporteront de votre réception le plus cordial souvenir. Je vous connaît bien pour en douter.
" Il est un point, mes chers concitoyens, que je voudrais pourtant préciser. Des manifestations comme celle qui se prépare sont des manifestations pour les principes et non contre les personnes. C'est pourquoi je fais auprès de vous un pressant appel pour qu'aucun cri hostile à l'adresse d'un adversaire quelconque ne soit poussé pour que règnent pendant toute cette journée la dignité et le calme qui seuls conviennent à de pareilles réunions.
" Si par hasard des provocations vous étaient adressées, sûrs de votre droit, certains d'être les défenseurs de la justice et de la vérité vous dédaignerez et resterez dignes de vous mêmes et de la cause que vous défendez.
" C'est vous, mes chers concitoyens, que je charge du service d'ordre. Vous ne faillirez pas au devoir qui vous incombe."
Finalement et en citant les sources de l'Assemblée Nationale "…bien qu'à la Chambre le rapporteur ait conclu après enquête et vérifications au renvoi devant le suffrage universel pour égalité de voix et que la quatrième commission se soit prononcée pour l'invalidation, l'Assemblée passa outre, le 25 novembre 1910, après une discussion orageuse et valida l'élection de Marius Devèze."
Cela ne lui porta pas chance : il ne fut jamais réélu et quitta la politique…
Une manifestation grandiose se prépare pour dimanche dans notre ville. De tous les points de notre circonscription tous les électeurs républicains honnêtes viendront à Anduze clamer leur indignation contre les manœuvres frauduleuses qui ont amené la proclamation provisoire de M. Devèze comme député.
" Vous recevrez dignement tous les manifestants, vous pavoiserez vos maisons et vous montrerez à tous qu'Anduze est toujours le boulevard de la République dans notre arrondissement. Je suis sûr que mes hôtes d'un jour emporteront de votre réception le plus cordial souvenir. Je vous connaît bien pour en douter.
" Il est un point, mes chers concitoyens, que je voudrais pourtant préciser. Des manifestations comme celle qui se prépare sont des manifestations pour les principes et non contre les personnes. C'est pourquoi je fais auprès de vous un pressant appel pour qu'aucun cri hostile à l'adresse d'un adversaire quelconque ne soit poussé pour que règnent pendant toute cette journée la dignité et le calme qui seuls conviennent à de pareilles réunions.
" Si par hasard des provocations vous étaient adressées, sûrs de votre droit, certains d'être les défenseurs de la justice et de la vérité vous dédaignerez et resterez dignes de vous mêmes et de la cause que vous défendez.
" C'est vous, mes chers concitoyens, que je charge du service d'ordre. Vous ne faillirez pas au devoir qui vous incombe."
Finalement et en citant les sources de l'Assemblée Nationale "…bien qu'à la Chambre le rapporteur ait conclu après enquête et vérifications au renvoi devant le suffrage universel pour égalité de voix et que la quatrième commission se soit prononcée pour l'invalidation, l'Assemblée passa outre, le 25 novembre 1910, après une discussion orageuse et valida l'élection de Marius Devèze."
Cela ne lui porta pas chance : il ne fut jamais réélu et quitta la politique…