C'est le passé et le présent qui se mélangent pour former la passionnante histoire culturelle de notre antique cité, tournée irrémédiablement vers l'avenir…
Ces "billets", pour amoureux d'Anduze, n'en sont que quelques modestes reflets.

28 juillet 2012

E.G. et les fileuses d'Anduze…



Les collectionneurs de cartes postales anciennes connaissent bien les initiales de ce photographe qui a, sans aucun doute, produit parmi les plus beaux clichés d'Anduze en ce début du vingtième siècle. A ce jour c'est malheureusement les seuls éléments dont nous disposons concernant l'identité de ce "preneur d'images", apparemment très apprécié des éditeurs en cartographie de l'époque. En particulier la librairie papeterie G. Puget à Anduze pour laquelle il effectua une série remarquable dans les années 1900. Du parc des Cordeliers en passant par le centre ville avec ses cafés et ses diligences, sans oublier la tour de l'Horloge ou le vieux pont au pied duquel les lavandières s'activaient au bord du Gardon, E.G. fixa sur la gélatine de ses plaques de verre quelques pages de l'histoire ordinaire d'Anduze…
Parmi celles-ci l'industrie séricicole trouve naturellement sa place avec l'importante activité des filatures. Lors de sa visite de l'une d'elles, notre photographe, comme tout bon spécialiste, fit plusieurs prises de vue. Il faut dire que les conditions de son travail dans cet environnement ne devaient pas être optimum : en dehors du fait qu'il fallait obtenir des nombreuses ouvrières de ne pas bouger au moment voulu, il régnait dans ces ateliers une atmosphère saturée de vapeur due à l'immersion des cocons dans des bassines remplies d'eau bouillante, dégageant d'ailleurs ainsi par la même occasion une odeur pour le moins pestilentielle. Deux photos viennent illustrer mes propos. La première, en haut, est exceptionnelle puisque inédite : c'est un tirage que j'ai pu obtenir d'après une plaque de verre originale d' E.G. que l'on peut considérer sans conteste comme faisant partie de l'ensemble des clichés pris ce jour là. La deuxième, comme on le voit, est la vue définitive choisie pour cette carte postale qui est aujourd'hui rare et recherchée par les amateurs.
Certes, l'image de ce photographe a une valeur documentaire essentielle pour notre histoire industrielle locale, mais n'oublions pas que c'est aussi, quand on détaille les visages de ces femmes jeunes et moins jeunes qui fixent l'objectif et vous regardent à travers un bon siècle passé, le témoignage émouvant d'une activité aux exigences particulièrement pénibles qui favorisèrent une perte de santé pour nombre d'entre elles…

16 juillet 2012

Joseph Zobel : paroles pour un Petit Turbulent…

Joseph Zobel
Il y a une trentaine d'années existait sur Anduze un petit mensuel (devenant le plus souvent trimestriel !…) de vingt pages appelé "Le Petit Turbulent". Traitant essentiellement de la vie locale avec toutes ses composantes, ce journal apportait une information et un ressenti indépendants. Les articles et reportages, tout en conservant un ton libre, avaient le mérite d'essayer d'établir une proximité entre citoyens. Le clin d'œil à ce périodique disparu aujourd'hui n'est pas innocent puisque c'est en feuilletant l'un des numéros de 1983 que j'ai découvert que sa rédaction d'alors avait procédé à l'interview de Joseph Zobel à propos de la sortie, la même année, du film "Rue Cases-Nègres".
Je vais donc en guise de conclusion à l'hommage rendu à cet écrivain, et  dont le patronyme est définitivement lié à l'histoire contemporaine et culturelle d'Anduze, vous proposer un extrait de cette intervention qui a l'avantage de nous permettre d'un peu mieux appréhender le profil philosophique de cette personnalité hors du commun. Il est bon de préciser que ce témoignage a été transcrit par "l'envoyée spéciale du Petit Turbulent" :
"…dernièrement j'entendais dans une émission qui lui était consacrée, Cocteau dire : "le poète doit être capable de tout" et c'est vrai. Un poète n'est pas uniquement celui qui écrit des vers. J'ai toujours éprouvé le besoin de faire quelque chose de mes mains, c'est pourquoi je pratique l'art floral japonais (Ikebana), cela fait seize ans que je l'étudie. Ce n'est pas un art d'agrément ni de la "fleuristerie", c'est comme la plupart des arts orientaux, une voie dans laquelle on se place pour se réaliser, afin de parvenir à l'accomplissement, cela devient philosophique, presque une religion. J'ai étudié au Japon avec de grands maîtres, j'ai moi-même le titre de maître. J'ai appris aussi au Japon le Shiatsu parce que dans la culture japonaise, tout se tient.
Le Shiatsu est une thérapeutique qui est surtout la façon de se bien porter en équilibrant l'énergie vitale du corps par des pressions exercées sur certains points qui sillonnent le corps. Je me suis remis au dessin à l'encre de Chine ; je m'occupe de mon jardin, j'ai eu aussi une formation au jardin japonais. Et vous savez que mon fils Roland est un potier de renom que j'admire beaucoup non seulement à cause de son succès, non seulement par sa compétence, mais je l'admire aussi comme homme, par sa façon de vivre et avec lui j'ai appris la poterie. Mais tout cela je dois vous dire je ne le fais pas en touche-à-tout, ni suivant mes sautes d'humeur. Toutes mes activités se suivent selon les saisons. Tout se tient, j'écris comme je pratique l'ikebana avec le même état d'esprit, j'allais dire la même technique. Tout ceci au lieu d'être un sujet de dispersion, au contraire, favorise la concentration et l'équilibre…"