C'est le passé et le présent qui se mélangent pour former la passionnante histoire culturelle de notre antique cité, tournée irrémédiablement vers l'avenir…
Ces "billets", pour amoureux d'Anduze, n'en sont que quelques modestes reflets.

26 février 2014

Le rêve magnifique de Jules… 2

Si dans les décennies et siècles à venir le problème de l'eau potable sera à n'en pas douter l'une des préoccupations majeures de l'humanité, cela fait bien longtemps qu'il suscite l'intérêt des grands centres urbains confrontés de façon récurrente à des difficultés d'approvisionnement de cet élément fondamental à toute société organisée.
A Nîmes la question s'était déjà posée sérieusement il y a deux mille ans pour être résolue grâce à un aqueduc de cinquante kilomètres allant capter l'eau claire des sources d'Eure, situées à proximité d'Uzès. Sa construction, essentiellement souterraine, trouva son apogée avec l'architecture aérienne du Pont du Gard, ouvrage extraordinaire témoin du génie des Romains. L'utilisation du long et sinueux canal fut abandonné au VI ème siècle, victime de détériorations dues aux différentes invasions de l'époque.
Même s'il y a eu certainement au cours du millénaire qui suivit des désirs de remettre en état de tout ou partie de l'aqueduc, c'est à partir du XVI ème siècle que nous en retrouvons la première trace écrite. Le XVIII ème et le début du XIX ème seront aussi propices à différents projets un peu plus sérieux mais toujours sans suites, leurs initiateurs étant finalement effrayés par deux considérations jugées prioritaires : le coût exorbitant de l'opération et l'opposition inévitable de la ville d'Uzès. Ce fut à partir de 1842 que Jules Teissier-Rolland décida d'étudier toutes ces recherches pour pouvoir lui-même concevoir un nouveau projet viable de remise en fonction d'un ouvrage antique abandonné depuis environ mille quatre cents ans ! Son plaisir devait être double : non seulement ce passionné d'histoire et de patrimoine sauverait par sa restauration une magnifique réalisation vouée à la ruine, mais de plus il faisait œuvre d'utilité publique en apportant à la ville de Nîmes l'eau nécessaire à son développement.
Sans entrer dans les nombreux détails environnementaux, techniques, hydrauliques, financiers et administratifs de son étude, il est intéressant de noter que son premier travail fut bien, au contraire des choix précédents de ses collègues, d'établir les mesures et le tracé précis du vieux canal sur toute sa longueur ; ce travail long et fastidieux étant rendu nécessaire pour déterminer au plus juste le budget des réparations envisagées, secteur le plus sensible du projet. 
En 1846, participant à un concours organisé sur le sujet et le remportant, son projet fut adopté par le Conseil municipal de Nîmes. La gloire et la postérité de Jules semblaient acquises, mais c'était sans compter sur des événements nationaux qui vinrent tout remettre en question : la révolution de 1848…

A suivre

12 février 2014

Le rêve magnifique de Jules… 1

Manifestement le dix neuvième siècle aura été pour notre cité une période particulièrement riche en personnalités exceptionnelles dont les renommées ont marqué de leurs différentes empreintes notre histoire locale et quelques fois même nationale. Si certaines ont bien traversé le temps à travers plaques commémoratives et nombreux témoignages divers, d'autres, pourtant non moins méritantes, ont vu leurs souvenirs s'estomper progressivement pour disparaître de la mémoire collective. C'est donc avec plaisir que je vais évoquer un Anduzien injustement oublié aujourd'hui mais qui fut pourtant, grâce à son intelligence, sa puissance de travail et ses capacités hors normes, l'une des grandes figures à la fois politique et scientifique de son époque dans le Gard.
Mais commençons par le commencement…
Jules Teissier-Rolland, issu d'une famille de notables, vit le jour à Anduze le 15 janvier 1798. Dès son plus jeune âge il montra des dispositions intellectuelles qui lui permirent de franchir facilement toutes les étapes de l'éducation scolaire. Ces brillantes années, à Anduze et Uzès puis Nîmes, le menèrent finalement jusqu'à Montpellier où il poursuivit des études de médecine. En 1822 il acquiert son diplôme de docteur mais plutôt que d'embrasser une carrière toute tracée le jeune homme profita d'une situation familiale confortable pour développer d'autres aptitudes beaucoup plus passionnantes à ses yeux. Avec un intérêt égal pour chacun d'entre eux, notre surdoué aborda des domaines aussi différents que l'agriculture, l'économie politique, l'archéologie, la paléontologie, les sciences naturelles, la physique et la chimie, démontrant ainsi un esprit aussi curieux qu'il pouvait être remarquable. D'ailleurs différentes publications viendront attester la valeur de ses travaux et la reconnaissance de ses pairs, notamment celle de ce que l'on appelait alors des "Sociétés savantes" comme l'Académie du Gard dont il était devenu membre.
Ce travailleur acharné, indépendant mais ouvert aux autres, trouva aussi dans l'investissement politique la possibilité d'apporter ses nombreuses compétences pour l'intérêt commun. Ce fut dans sa ville natale et à l'âge de trente ans qu'il obtint son premier mandat de conseiller municipal pour devenir deux ans plus tard adjoint. S'il refusa à plusieurs reprises au cours de sa carrière le poste de premier magistrat de sa commune, à laquelle il resta jusqu'au bout très attaché, l'une des raisons en était certainement sa fonction de vice-président du Conseil Général du Gard avec de gros dossiers a traiter. Parmi ceux-ci il y en avait un qui lui tenait vraiment à cœur car l'œuvre majeure de toute une vie, son extraordinaire projet concernant " la question des eaux de la ville de Nîmes "…

A suivre